Bulletin d’information de novembre 2021

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Droit Bancaire

  • Prononcé de la déchéance du terme :

Dans le prolongement de la question préjudicielle posée à ce sujet (cf. notre newsletter d’octobre 2021), la Cour d’appel de Bordeaux avait, de son côté, jugé qu’une mise en demeure adressée à l’emprunteur, sans préciser expressément qu’à défaut de règlement, sous un certain délai, la déchéance du terme serait prononcée, la résiliation du contrat par l’établissement de crédit est irrégulière.

Cour d’Appel de BORDEAUX 2e chb. civ. 31/01/2019 : n°18/01828

Droit des suretés

  • Recours des cautions entre elles (notamment de la caution professionnelle à l’égard de la caution personne physique :

Lorsqu’une dette est garantie par plusieurs cautions, et que l’engagement de l’une d’elle est reconnue comme disproportionnée, si bien que le créancier ne peut s’en prévaloir, cette décharge sera également opposable aux autres cautions :

La caution qui a payé en lieu et place du débiteur principal ne pourra pas se retourner contre la caution dont l’engagement a été jugé disproportionné.

En l’espèce, il s’agissait d’une caution professionnelle qui se retournait contre une caution accordée par un particulier.

Arrêt Cour de cassation 1e civ 08/09/2021 : n°19-24.129

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  • Précisions sur l’articulation entre la prise de mesures conservatoires à l’encontre de la caution et le redressement judiciaire du débiteur principal

Pour rappel, l’ouverture d’une procédure collective à l’encontre du débiteur principal n’interdit pas la prise de mesures conservatoires (saisies conservatoires ou hypothèque provisoire) à l’encontre de la caution (art.L622-28 C. Cce).

Pour autant, le Code des procédures Civiles d’Exécution impose d’engager une action au fond, dans le mois de la prise d’inscription provisoire, afin d’obtenir un titre pour validation de ladite inscription (ou autre mesure conservatoire) (L511-4 et R511-7 du CPCE).

Dans le même temps, la loi relative aux procédures collectives fait interdiction de toute action en paiement à l’encontre de la caution, tant qu’un plan de redressement n’a pas été arrêté (L622-28).

La Cour de cassation avait déjà précisé l’articulation de ces deux textes : le créancier est, par dérogation aux règles des procédures collectives, autorisé à assigner la caution en paiement, mais devra solliciter un sursis à statuer tant qu’un plan ne sera pas adopté.

Mais quid si la créance n’est pas exigible (puisqu’un redressement n’emporte pas exigibilité de la créance) : le créancier peut-il alors tout de même agir ?

La solution vient d’être donnée par la Cour de cassation, qui censure l’arrêt d’appel déféré : afin de ne pas priver le créancier de la possibilité de prendre une inscription d’hypothèque provisoire à l’encontre de la caution, il peut agir en paiement à son encontre, quand bien même le débiteur principal serait en redressement judiciaire (rappel de l’ancienne jurisprudence), mais peut également solliciter un titre à l’encontre de la caution, une fois un plan adopté dans le cadre du redressement, et ce quand bien même sa créance ne serait pas exigible :

« En se déterminant ainsi, sans rechercher, alors qu’elle avait constaté que la banque se prévalait de l’inscription d’une hypothèque judiciaire provisoire sur des immeubles de la caution, si cette créancière n’était pas fondée, afin d’éviter la caducité de la mesure conservatoire, à obtenir un jugement de condamnation de la caution avant l’exigibilité de sa créance à son égard, la cour d’appel a violé les textes susvisés »

Arrêt Cour de Cassation Chb. Com. 08.09.2021 : n°19.25-686

Droit Immobilier Syndic- Urbanisme

  • Vices apparus en cours de bail : qui en supporte les conséquences :

Dès lors qu’un vice n’apparait qu’en cours d’exécution du bail (et n’est donc visible a priori, que du preneur), le locataire ne pourra le reprocher au bailleur s’il ne l’en a pas immédiatement averti (ou à tout le moins dans un délai raisonnable).

Arrêt Cour de cassation 3e civ 13. 10. 2021 : n°20.19-278 publié

  • Servitude de passage en copropriété :

Aucune servitude de passage ne peut grever une partie commune d’une copropriété.

Arrêt Cassation 3e civ. 23.09.2021 : n°19-22.556

  • Promesse de vente pas de rétractation possible :

Sauf à voir expressément prévu cette faculté dans l’acte, le promettant d’une promesse unilatérale de vente s’engage définitivement et ne peut donc plus revenir sur sa promesse.

Si cette solution résulté désormais de l’article 1124 du code civil (suite à la réforme du droit des contrats de 2016), s’agissant des promesses antérieures, jusqu’alors la jurisprudence acceptaient la rétractation du promettant dès lors qu’elle intervenait avant la levée d’option par le bénéficiaire.

Dans cet arrêt, la Cour de cassation a appliqué à une promesse antérieure à la réforme de 2016, la solution des textes nouveaux, jugeant que le promettant s’était définitivement engagé, et ne pouvait donc plus se rétracter.

Arrêt Cour de cassation 3e civ. 20.10.2021 : n°20-18.514

  • Logement meublé indécent : pas de requalification en logement non meublé !

Pas d’exclusion de plein droit de la qualification de meublé (donc du régime juridique spécifique applicable) du fait que le logement meublé ne répondrait pas aux normes de décence. Dans cette affaire le locataire tentait d’obtenir la requalification en bail d’habitation « classique » pour faire annuler un congé pour vendre dépourvu de mention relative au droit de préemption du locataire (qui n’existe pas en matière de bail meublé).

CA DOUAI 29 juillet n°20/03151

  • Indécence, insalubrité et paiement du loyer

Indécence et insalubrité sont deux notions distinctes. L’arrêté d’insalubrité suspend de plein droit le paiement du loyer. En revanche l’indécence du logement autorise le juge à réduire le montant du loyer ou à suspendre son paiement (avec ou sans consignation) jusqu’à la réalisation de travaux.

Un logement indécent finit par faire l’objet d’un arrêté d’insalubrité. Ce dernier suspend le paiement des loyers pour l’avenir. Le juge peut également suspendre le paiement avec effet rétroactif jusqu’ au jour de la signature du bail mais il peut également se limiter à une simple réduction du loyer. Le juge peut ainsi considérer que le locatiare n’a pas assuré l’entretien suffisant du logement.

CA PAU 29 juillet 2021 20/02564

  • Bail dérogatoire

Dès lors que les échanges entre les parties permettent sans équivoque et de manière expresse de démontrer que telle est leur intention, le bail dérogatoire d’une durée inférieure à trois ans peut être renouvelé tacitement , sans écrit. (Un écrit demeure bien sûr une sécurité même si le texte n’impose pas d’acte de renouvellement du bail dérogatoire)

CA PARIS 16 juin 2021 19/00908

  • Copropriété :

La demande d’annulation d’une décision d’AG ne peut se faire que par voie d’assignation et pas de conclusions. En l’espèce une copropriétaire avait contesté une résolution sans en demander l’annulation mais en demandant au juge de se substituer à l’AG en statuant sur le fond de la résolution ( sur une question de redistribution des caves). En cause d’appel, elle conclut pour la première fois à l’annulation de la résolution. La cour de cassation tranche expressément en faveur d’une interdiction de demander la nullité d’une résolution d’AG par voie de conclusions à peine d’irrecevabilité. Une telle demande ne peut être que principale, formée par voie d’assignation et soumise au délai de prescription (2 mois à compter de la notification de l’AG ) de l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965.

Cass. Civ. 2ème 20 mai 2021 n° 20-14.266

Droit des Affaires

  • Répartition des responsabilités entre le mandant et le mandataire :

En cas de dol commis par le mandataire, la responsabilité de son mandant ne peut être engagée, sauf à démontrer une faute personnelle de sa part.

La Cour de cassation a tranché dans un arrêt de principe rendu en chambre mixte.

Arrêt Cour de cassation chb mixte 29/10/2021 : n°19-18.470 publié au bulletin

Droit de la famille

  • Comptes entre époux – Récompenses et changement du matériel professionnel de l’un des époux :

Lorsque le fonds exploité par un des époux est un propre (n’appartient pas à la communauté), mais que marié sous le régime de la communauté, ses revenus sont donc des biens communs, si en cours de mariage, l’époux change (ou fait réparer) un matériel déjà existant au jour du mariage, cela n’accroit pas son patrimoine propre (il y a simplement remplacement), dès lors aucune récompense n’est due par cet époux (quand bien même les frais ainsi exposés ont été réglés via de deniers communs (en l’espèce ses revenus).

En revanche, s’il acquiert, en cours de mariage, du nouveau matériel, l’opération ouvre droit à récompense puisque ce matériel, étant professionnel (et donc l’accessoire d’un fonds propre), il sera un propre de cet époux, et ne sera pas soumis à partage ; ce faisant, cet époux s’enrichit, et devra donc récompense à la communauté à ce titre.

La Cour de cassation opère ainsi une distinction ente le remplacement d’un matériel professionnel, et l’achat d’un nouveau matériel.

Arrêt Cour de cassation 1e civ. 13/10/2021 : n°19-24.008

  • Succession et attribution préférentielle d’un bien immobilier :

Pour qu’un héritier puisse utilement solliciter l’attribution préférentielle d’un bien immobilier au motif qu’il y habite, il doit justifier et démontrer non seulement le caractère effectif de sa résidence à cet endroit, mais également le caractère continu de son habitation.

A défaut, il ne pourra solliciter, sur ce fondement, l’attribution préférentielle de ce bien, à défaut d’accord.

Arrêt Cour de cassation 1e civ. 29/09/2021 : n°20-21.994